Tri des déchets : Zero Waste France porte plainte contre deux établissements McDonald's et KFC à Paris République.

À Paris, le 18 octobre 2018 - L'association Zero Waste France vient de déposer plainte contre deux établissements des chaînes McDonald's et KFC situés Place de la République à Paris, pour l'absence de tri des déchets en salle. En effet, le tri constitue une obligation réglementaire depuis 2016 pour de telles entreprises. Après une investigation de terrain, l'association sollicite ainsi l'ouverture d'une enquête au Procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Paris.

Les tri des déchets en entreprise : une obligation depuis le 1er juillet 2016

Depuis un décret entré en vigueur le 1er juillet 2016, communément appelé le "décret 5 flux", toutes les entreprises, ainsi que commerces ou administrations, ont l'obligation de trier leurs déchets de papier, métal, plastique, verre et bois[1]. Ce texte étend ainsi à tous les acteurs économiques l’obligation de tri qui s’impose déjà aux ménages.

La mise en oeuvre de ce texte se fait cependant attendre, faute de solution de tri pour les salariés et clients. Il en va ainsi du secteur de la restauration rapide, qui génère chaque année 13 milliards d'unités d'emballages. Pour documenter ce constat, Zero Waste France a publié en mai 2017 un rapport sur la politique déchets de l'enseigne McDonald's. Il démontre l'inertie de la chaîne (qui pèse presque 4.8 milliards d'euros de CA en France) en matière d’économie circulaire. Une pétition et des mobilisations avaient ensuite eu lieu partout en France pour demander la mise en place du tri. 

Deux ans plus tard, seuls quelques établissements McDonald's font le tri en salle (76 selon les annonces de McDonald's France en mai 2018, sur environ 1 500 établissements), et force est de constater les atermoiements de la chaîne qui va de "tests" en "expérimentations" depuis plus de 10 ans. Pour sa part, KFC ne semble envisager aucun début d'expérimentation, malgré l'ambition d'ouvrir 300 restaurants supplémentaires d’ici 2025.

Une enquête de terrain pour documenter une plainte pénale 

Le non-respect du tri des 5 flux est passible d'une sanction administrative d'un montant maximal de 150 000€ (article L541-3 du Code de l'environnement), et constitue une infraction pénale punie d'une peine maximale de deux ans d'emprisonnement et 75 000€ d'amende (4° et 8° de l'article L541-46 du Code de l'environnement). 

La plainte de Zero Waste France fait suite à une enquête documentant l'absence de poubelles de tri en salle, et sur l'analyse des sacs une fois sortis des restaurants. Ces deux établissements sont pourtant très fréquentés, dans une zone à la fois très dense de Paris et très visitée, à deux pas de la statue de la Place de la République.

Selon Thibault Turchet, responsable des affaires juridiques de Zero Waste France, "le secteur de la restauration rapide est fortement producteur de déchets, pourtant pour la plupart recyclables. ll est donc urgent que ce secteur, et plus généralement les entreprises, respectent les réglementations qui leur sont applicables, sans quoi l'économie circulaire ne progressera pas".

L'association, représentée par son avocat Maître Alexandre Faro, espère désormais l'ouverture d'une enquête par le Procureur. Elle a en tout état de cause adressé ce jour un courrier au Ministère de la transition écologique et solidaire pour l'alerter de cette situation.

Les sociétés faisant l'objet de la plainte sont présumées innocentes jusqu'à ce qu'elles soient déclarées coupables.

[1] Selon le décret, cette obligation de tri concerne les déchets de papier, métal, plastique, verre et bois, pour tout producteur qui n'a pas recours aux collectes du service public. Un seuil de 1 100L de déchets par semaine s'applique pour les implantations collectées par une collectivité.

«Il s'agit d'une situation isolée», se défend McDonald's, KFC met en avant sa transparence

Contacté par le quotidien le Figaro, le groupe McDonald's France affirme respecter «le décret 5 flux» dans ses 1500 établissements, avouant néanmoins un «dysfonctionnement dans celui de République». «Le franchisé et les équipes de ce restaurant ont d'ores et déjà apporté des mesures correctives pour régler cette situation isolée non conforme aux pratiques de l'enseigne», précise le groupe. «C'est un grand réseau, le risque zéro n'existe pas, et cette plainte est prise très au sérieux», assure-t-on.

Le groupe McDonald's contribue à hauteur de 50 millions d'euros à la taxe CITEO. «Cette taxe permet aux entreprises de faire passer leurs déchets en déchets ménagers assimilés», assure le groupe, qui, affirmant «ne pas se laver les mains par ce biais», «développe également des filières de tri pour aller un cran au-dessus de cette taxe». «C'est une parade que McDonald's nous sortait déjà en 2017», rétorque Thibault Turchet, qui insiste sur le fait que l'enseigne ne se réfère pas à la bonne réglementation.

En ce qui concerne le groupe KFC, il affirme «prendre très au sérieux» le sujet du recyclage. «En cuisine, les bio déchets font déjà l'objet d'un tri spécifique en accord avec la réglementation en vigueur. L'ensemble des restaurants concernés sont en conformité avec cette réglementation», communique le groupe, prenant «acte de la plainte symbolique» de l'ONG. Ce soir, le magazine Envoyé spécial diffusera une enquête sur ce sujet.

Les poubelles du KFC dans la nuit du 26 au 27 juillet 2018.

Les poubelles du KFC dans la nuit du 26 au 27 juillet 2018.

Les poubelles du McDonald's dans la nuit du 26 au 27 juillet 2018. On observe les cartons fournisseurs, en apparence triés, re-mélangés avec les déchets de salle

Les poubelles du McDonald's dans la nuit du 26 au 27 juillet 2018. On observe les cartons fournisseurs, en apparence triés, re-mélangés avec les déchets de salle